jeudi, février 14, 2008

My bloody Valentine

On entend souvent autour de soi des gens se plaindre au sujet de la St Valentin. Soit que cette fête leur rappelle, au pire, qu’ils sont célibataires, soit qu’ils trouvent qu’elle fait partie de la série de récupérations consuméristes à ranger auprès des halloween et autre fête de Noël, ou soit encore, selon l’argument ô combien romantique que ce n’est pas un seul jour par an qu’il faut s’aimer, mais toute l’année. Au Liban, on a réglé le problème de manière radicale. On commémore l’assassinat, commis le 14 février 2005 au moyen de deux tonnes de TNT, de l’ancien Premier Ministre Rafiq El Hariri.

La veille, les préparatifs. L’armée pose les barricades et les barbelés dans les rues pour canaliser la foule du lendemain. La rue Gemmeyzé, cœur vibrant de Beyrouth, où l’on observe d’habitude deux kilomètres de file de voitures, était hier calme comme si il était 5H du mat. J’ai même cru apercevoir une voiture la remonter en sens unique, même pas pressée. Un ami me signalait que, appelé par une faim subite vers la même heure, il s’est retrouvé, seul, au Mac Do, d’ordinaire bondé de monde, au milieu d’une centaine de ballons en forme de cœurs rouges flamboyants accrochés au plafond. L’important est de sauver les apparences.

Le lendemain (aujourd'hui), c’est donc plus par pure curiosité que par conviction que je me suis rendu à la manifestation d’hommage rendue en l’honneur du martyr libanais. Il y avait énormément de monde. Les médias pro-gouvernementaux vont de plusieurs centaines de milliers au chiffre délirant de un million (+500.000 se baladant dans les rues adjacentes) selon An Nahar. A vue de nez, je dirais 100.000. Le chiffre est de toute façon remarquable étant donné le temps qu’il a fait : un temps typiquement belge avec une pluie froide et continue, toute la journée, comme peuvent l’être les coupures d’électricité. J’ai fait l’exercice à un moment donné de compter 50 drapeaux autour de moi, à vue. Cela donnait une proportion, si l’on ramène à 10, de 3 drapeaux libanais, pour 6 drapeaux des Forces Libanaises (Chrétien, Geagea) ou phalangistes (Chrétien, Gemayel), pour 1 drapeau soit du Courant du Futur (Sunnite, parti des Hariri), soit du PSP (Druze, Joumblatt). Quelques herzats de drapeaux de groupuscules qui ne valent pas la peine d’être cités, ne cassons pas l’ambiance.

La teneur de la manifestation était donc ultra politique. Elle était avant tout largement une mobilisation à l’appel des partis de la coalition gouvernante du 14-mars. Comme l’était la mobilisation quasi-simultanée à Dahhieh (Sud Beyrouth), sur appel du Hezbollah pour rendre hommage à l’Imad Mughniyah, cadre du Hezbollah tué il y a 3 jours à Damas dans un attentat. Dans le climat actuel, tout est extrêmement politisé, tout est prétexte à juger des « forces en présence » et à récupérer. Un peu à l’image des vitrines de magasins concernant la St Valentin.

J’ai pris quelques photos au reflex, mais la 1ere et la 3e illustrant ce post, sont de S.C., que je salue vivement au passage.



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