dimanche, août 20, 2006

Syrie (2) : de Apamee a Beyrouth

Quelques photos d'un dernier developpement.

Souq d'Aleppo








Le pont sur l'Euphrate a Deir es-Zor, de l'autre cote, la Mesopotamie.

Vue sur la vallee de l'Euphrate entre Deir es-Zor et la frontiere irakienne.

Le desert syrien a Duro Europos.

jeudi, août 10, 2006

Syrie (1)

Hama, Syrie - Il y a parfois des moments dans mes etapes ou je ne parviens plus a bouger d'un iota, ecrase par une fleme pas possible ou par la chaleur, ou les deux. Halep (Aleppo) en fait partie, comme ce fut un peu le cas a Sarajevo. Je me suis refugie dans l'hotel al-kasr al-andaloos, literallement, le palais andalou. En terme de "palais", l'expression est un peu galvaudee, c'est quand meme un hotel typiquement moyen-oriental, pas dans les guides, un peu defrechi. Enfin, deja il y a pas de cafards, je m'en tire bien. Aux murs du patio, une sorte de crepi rose completement degueu, des tentures roses pas beaucoup mieux descendent du haut des portes. Dans ce patio, d'ou donne une mezzanine qui dessert les chambres du deuxieme etage, non occupees il me semble, deux irakiens glandent toute la journee. De vrais arabes du golfe, jamais un mot plus haut que l'autre, doux, tres discret. A mille lieux de l'image des enrages qui mettent l'Irak a feu et a sang apres le passage des americains. Il y a aussi Habou Rachid, qui m'a envoye porter mon linge a laver 3 rues plus loin avec comme mission de dire au blanchisseur que je venais de sa part, sous le ton de la confidence. Un vieux monsieur sautillant est la en permanence aussi dans le hall. Il recopie un bouquin en arabe, ou il prend des notes, je ne sais pas. C'est une personne de la famille. Il fait les cent pas devant l'ecran de television acroche a 2 metres de haut et me commente l'actualite en arabe. Apres 4 jours, malgre que je lui ai dit quelques fois que je suis belge, il me presente toujours comme etant australien. Au debut, je rectifiais "La, la, ana min belgica", maintenant, je laisse dire. J'ai des bouquins a lire. Et un oeil constant sur Al Jazzirah, et sur l'internet deux rues plus loin, sur l'evolution de la situation au Liban, car c'est pour cela que je suis ici a Halep. A savoir, attendre que cela se calme au Liban.

Mais que se passe-t-il dans la rue ? Est-ce dangereux ?

Au 3e jour, je me suis quand meme decide a sortir et a aller visiter cette bonne vieille ville d'Aleppo. Au coin de la rue xxx, un gars vend des DVD et des CDs de films, avec un appareillage de campagne, un petit ecran couleur et un lecteur branches je ne sais trop ou. La foule s'amasse regulierement a chaque nouvelle representation. Hier soir c'etait un petit film a la gloire du Hezbollah en boucle. On voit un attentat sur une place de village, les djihadistes, tous embusques, sortent des armes d'en-dessous de leur djellabahs et descendent des soldats israeliens. S'en suis une course poursuite de l'un des instigateurs de l'attentat poursuivi par des militaires israeliens, qui s'echappe de toit en toit et en descend grace a une corde a linge. Ca tient de la bouffonerie. Sous une musique typiquement syrienne et un chant bien entrainant pour casser de l'Israelien. Au tout debut j'ai vraiment cru qu'il s'agissait d'une pub pour le recrutement de djihadistes, mais ce n'etait qu'un film. En tout cas je donnerais cher pour jouer dans un film pareil, ils avaient l'air de bien s'amuser.

Ce soir quand je suis passe, il y avait a l'ecran des femmes bien en chair, tee-shirt trop court et jeans moule-fesse du meilleur effet je vous dis pas, qui faisaient "chouf chouf", expression typique pour designer une sorte de danse du ventre, les bras a l'horizontale, ici sur fond de paysages de desert montagneux. Et chaque fois cette foule qui s'arrete sur le trottoir, on ne peut que partir en souriant.

Une autre scene surrealiste en rentrant un soir tard dans mon palais andalou, un camion nettoyeur s'engage dans la rue juste au moment ou je la traverse. Il fallut de peu que je ne sois balaye par le jet d'eau. Car en fait de jet d'eau, c'est un veritable karcher qui est branche sur ce camion citerne. Il fait 10 metres ce camion. A la cabine du conducteur, a droite, un drapeau syrien flotte au vent, a gauche, le drapeau jaune du hezbollah. Le Hezbollah nettoie la rue au karscher, qu'on se le dise. Ca donnera peut etre des idees a Sarkozy.



Halep est une ville passablement hostile, surtout sous le soleil ecrasant. Les gens sont nerveux, meme pour eux il fait trop chaud. La circulation est dense, les klaxons continus. On se bouscule constament, on sue. Il ne faut pas oublier de boire, beucoup, tout ce qui traine. Les vendeurs de limonade au gingembre qui repose autour d'un bloc de glace. Boire aux fontaines des mosquees. Boire du the brulant, ca aide a surmonter la soif aussi. Le souq d'Halep est passablement frais, avec ses rue super etroites et ses "Khan" (anciens refuges de voyageurs, en general des batiments construits autour d'une cour-jardin). Les gens restent eveilles jusqu'a 2 heures, 3 heures du matin. A 4h30, le muezzin s'egosille pour la premiere priere de la journee, elle va etre longue.

Cette annee, il n'y a pas de touristes. Dans la fournaise de juillet et aout il n'y en a deja pas beaucoup. Mais cette annee, en plus, il y a les evenements au Liban. Pas beaucoup de possibilites de visiter les sites autour d'Halep en taxi avec d'autres touristes pour partager les couts. Et le faire seul, en transports en communs, j'en ai un peu marre de visiter des ruines seul. J'imagine aussi ce que ca doit etre, la, au milieu des ruines d'apamee ou dans les villes mortes en plein desert.

Heureusement il y a les hammams et les maisons de the ou on fume le narguile pendant des heures. Mais dans un cas comme dans l'autre il ne faut pas en abuser, une fois par semaine ca suffit. Et heureusement aussi, les Syriens sont conformes a leur reputation d'hospitalite et de gentillesse. Il est impossible de se sentir seul dans ces circonstances.

Il y a quelque chose qui ne marche fondamentalement pas en Syrie, le delabrement est perceptible a tous les niveaux. Prenez les telephones publics par exemple, je parle d'Halep, je ne sais pas si c'est pareil ailleurs. Mais toutes les cabines publiques sont depourvues de telephone. Alors je ne sais pas si ceux-ci ont ete arraches ou si ils doivent toujours etre places, j'en ai fait 40 plutot qu'une, mais partout pareil. Par contre j'ai vu des voitures superbes, de vieilles mercedes et des ancetres qui roulent toujours utilement. Les taxis pullulent et heureusement sont legers. A mon arrivee a la gare de bus, je ne m'etais pas rendu compte que l'un d'entre eux etait en train de me pousser la jambe tout en me roulant sur le pied. Il
me roulait dessus le con. Je pense meme qu'en faisant marche arriere il m'a roule sur le pied une deuxieme fois. On apprend a la longue a user de ce regard noir avec le geste indispensable qui consiste a joindre les 5 doigts en l'air.

Hama

Voila une petite ville que je recommande pleinement. On y mange bien, l'atmosphere y est tres paisible en regard d'Halep. N'importe quel habitant vous le dira. Les hotels sont plus que corrects a des prix hors competition. Et elle a un atout indeniable dans la mesure ou elle est traversee par une vraie riviere, avec de l'eau, c'est assez singulier que pour etre signale. Le long de cette riviere, d'immenses roues, des norias, brassent l'eau et la versent dans des aqueducs qui serviront a irriguer les cultures un peu en-dehors de la ville. Norias sur lesquelles des gamins jouent a se laisser remonter par les battants des moulins a eau et en sautent une fois arrives a 10 metres de hauteur. Avec cette effusion d'eau de partout, les moulins a eau, les fontaines et autres jets d'eau, regulierement, vous avez de minuscules bruines d'eau fraiche portees par le vent qui vous caressent tendrement le visage un peu partout au centre-ville. Ajouter a cela quelques parcs et cela donne a cette ville une allure d'oasis luxuriante au milieu du desert. Impression plus forte encore quand vous regardez au loin du haut de la colline ou il y a du y avoir un jour une citadelle. Quitte a attendre la fin des hostilites au Liban, c'est ici que j'attendrai quelques jours. Il y a moyen de faire une excursion au Krak des Chevaliers a partir d'ici ainsi qu'un chateau ismaelien, periode secte des assassins. Un autre jour si je suis toujours ici, il est possible de pousser une visite a Apamee, site archeologique majeur apres Palmyra ainsi que l'une ou l'autre des villes mortes a une cinquantaine de kilometres au nord.

Le lendemain, ce sera donc le Krak des chevaliers. Je passe les details historiques, toute bonne encyclopedie comme wikipedia.org est apte a donner de precieux renseignements.

La journee avait bien commence, en fait j'ai pris, une fois n'est pas coutume, une excursion et l'organisateur s'est rendu compte qu'il avait inscrit plus de gens qu'il n'y a de places dans la camionette. Je suis reste la sur le trotoir avec un couple de polonais.

On n'a pas perdu au change, une SUPERBE bagnole s'est amenee, une mercedes blanche immacule, avec le vieux sigle mercedes devant, le radiateur comme un juke box, interieur cuir, changement de vitesse avec un levier au volant, petite manivelle dans la portiere pour ouvrir les petites fenetres laterales, elle devait dater des 50's. Vraiment une superbe bagnole. Donc on monte, les polonais derriere, moi devant. Tout se passe bien pendant la journee, on recroise les autres qui n'en croient par leurs yeux. Ca frime, je fais le malin en discutant avec les gens, de toute facon, "ma" bagnole attend.

Au retour, atmosphere super chaude, super fatigue, je m'endors.
Au reveil, le polonais me demande si je peux demander au chauffeur, qui ne parle pas anglais, si il peut les deposer a la gare des bus pour acheter un billet pour le lendemain. Je me tourne vers le chauffeur, je lui sors un truc en arabe, il se tourne vers moi une seconde, je suis sur le siege passager. La, je vois le polonais qui tend le bras en avant avec sa figure qui se decompose. Le temps de me retourner vers l'avant, une bagnole quasiment a l'arret est a 3 mettres devant nous, plein freins, mais trop tard, l'emboutissement parfait et violent dans un bruit de tole effroyable. Pas de degats physiques, mais la bagnole est pas loin du sinistre total. Une femme a traverse la rue subitement d'apres la polonaise qui a vu la scene, la voiture devant a fait un grand ecart et a freine, et nous on est rentre dedans a pleine vitesse.

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