jeudi, mai 17, 2007

Quelques considérations sur l'élection de Sarkozy à la présidence de la République française dans le cadre du conflit israélo-arabe.

Dernier post en relation avec nos voisins du sud, apres ceci, on passera a autre chose.

Comment d'abord ne pas se souvenir du discours de Nicolas Sarkozy au French American foundation le 12 septembre 2006, jour où il rencontra Georges Bush également, en lui promettant allégeance, ou du moins, des relations franco-américaines détendues. Ce jour là, le nouveau Président a dit "combien [il] se sent proche d'Israël. Israël est la victime. Il doit tout faire pour éviter de passer pour l'agresseur". C'est clair que cela relève de tout un challenge...

Par exemple, la semaine dernière encore, le Journal le Monde faisait part d'un rapport de deux associations israéliennes des droits de l'homme (1) sur la situation lamentable des détenus palestiniens en Israël. Je n'ai retenu qu'un chiffre, c'est que depuis l'occupation (40e anniversaire cette année - banalement considéré, côté sioniste (2), comme le 40e anniversaire de.... la réunification de Jérusalem), 700.000 Palestiniens, c'est à dire plus d'un tiers des hommes, ont été détenus à un moment ou à un autre en Israël. Certains l'ont été parfois des années, et parfois sans procès. Citons juste en ordre éparpillé le mur en construction, la guerre de juillet qui a détruit un pays pour plusieurs années, le million de bombes à fragmentation (une pour quatre Libanais) larguées dans les deux derniers jours du conflit au Sud Liban, la vie impossible des Palestiniens de Jérusalem, il faut le voir et le vivre pour le croire, et encore.

Le 7 mai, lendemain de l'élection, le Premier Olmert, qui frôle le zéro absolu en terme de cote de popularité, s'est entretenu avec Sarkozy, qui lui a dit, selon le communiqué de presse : "Je suis un ami d'Israël et Israël peut toujours compter sur mon amitié". Le quotidien populaire Maariv écrivait dans ses colonnes qu'on assistait à une "révolution française grâce à laquelle un ami évident d'Israël accède à l'Elysée pour la première fois de l'histoire de la Ve République".

Netannyahou (chef de l'opposition nationaliste à la Knesset) ne se considère-t-il d'ailleurs pas comme "un ami personnel de Nicolas Sarkozy depuis cinq ou six ans" ? (ils avaient en charge les Finances de leur gouvernement respectif).

Au delà des déclarations de circonstance (assez normales dans le cadre d'une victoire électorale aux Presidentielles francaises, seul Poutine ayant fait la gueule et l'ayant montré), au cours des mois qui ont précédé la campagne, le nouveau Président a répété à plusieurs reprises, en substance, que la sécurité d'Israël prime, ce qui passe par la création d'un Etat palestinien indépendant et viable (3). Tous les observateurs s'accordaient à dire que l'élection de Nicolas Sarkozy équivaudrait à un tournant dans la politique française au Proche Orient, celle en vigueur depuis 1967 et De Gaulle.

Et puis, mini-coup de théâtre, dès le 8 mai, Nicolas Sarkozy promet l'ouverture.
Dans ce cadre, l'annonce de la nomination possible d'Hubert Vedrine au poste de Ministre des Affaires étrangères a semé l'émoi dans la presse israélienne de dimanche dernier (voir entre autres le Jérusalem Post). Vedrine est en effet passablement sceptique, c'est le moins que l'on puisse dire, par rapport à la toute puissance américaine et plutôt pro arabe. Ancien Ministre de Mitterrand et dans le dernier gouvernement Jospin.

Cela a fait bien sûr tache dans la relation privilégiée annoncée avec l'élection du nouveau président. En terme de faux pas, Sarkozy ne pourra jamais rivaliser avec son prédécesseur, mais il y a du potentiel.


Je n'ai pas trouvé dans la presse française de traces de cet émoi. Bien dans la presse israélienne et américaine. Ceci, c'était le 13. Sans vouloir y voir une relation de cause à effet (Vedrine a plus que probablement decline poliment l'offre), le 15, Sarkozy propose à Kouchner les Affaires Etrangères...


Ce qu'un president courageux devrait oser dire et faire.

Mon impression est que sans pression internationale sur l'Etat d'Israel, la situation ne changera pas. Il n'y aura pas de solution négociée.

Durant l'apartheid en Afrique du Sud, il a fallu déjà 40 ans à la communauté internationale pour reconnaître le caractère absolument scandaleux du régime de Pretoria. Ce qui résulta en boycott et en embargo. On n'en est même pas encore là concernant Israël. Il n'y a quasi aucune conscience du côté israélien de ce que le régime sioniste fait subir aux populations palestiniennes et au-delà de ses frontières, en leur nom. Même la plupart des intellectuels de gauche en Israel, représentant peut-être 5% de la population israélienne et au faît de l'actualité, ne sont pas au courant du largage des cent mille bombes à sous-munition au Sud Liban dans les trois derniers jours de la guerre de juillet (4). Liquidation des stocks. Si on veut se renseigner, les moyens existent, il y a l'internet, la télévision, Al Jaazira... mais on n'aime pas se faire présenter un miroir devant soi et y voir un monstre.

Attention, je ne dis pas que des régimes de pays arabes, dans les mêmes conditions, avec les mêmes moyens, ne feraient pas pareil, voire pire. Je ne sous-estime pas le caractère terrorisant des attentats suicides. Cependant, aujourd'hui, la force est d'un côté, l'opresseur est soutenu largement par la communauté internationale.

Concernant la paix Israël - Syrie, un moment envisagée, avant un rappel à l'ordre de Washington. C'est un comble, mais l'ingérence américaine n'est pas toujours perçue d'un bon oeil au sein de la société civile israélienne. Cette paix est une précondition pour une stabilisation des relations entre le Liban et Israël. Le Liban n'a pratiquement aucun pouvoir d'initiative en la matière. Dans ce contexte, le Hezbullah et le Hamas (5) sont nécessaires médiatiquement au régime sioniste pour entretenir le mythe de son expansion et de son occupation de la Cisjordanie, des territoires libanais autour des fermes de Sheba'a (6), riches en ressources hydrauliques et du Golan syrien. De l'autre côté, le Hizbullah et le Hamas ne seraient rien sans l'occupation israélienne du Sud Liban (1982-2000) et de la Palestine (1967).

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(1) B'Tselem et Hamoked, voir rapport sur site internet : http://www.btselem.org/ et http://www.hamoked.org.il/index_en.asp

(2) Il y a une confusion de définition, et ce même en Israël, sur le terme "sioniste". Pour moi il s'agit, aujourd'hui au XXIe siècle, des opposants aux frontières dessinées par l'ONU en 1948 et favorables à l'expansion de l'Etat israélien en dehors de son territoire alloué. Il a un sens péjoratif, et ne peut être assimilé aux primo-arrivants des années 30-50, qui avaient une démarche toute légitime. Si on se tient à cette définition du sionisme, il y a ainsi une bonne part d'"anti-sionistes" en Israël même.

(3) la seule solution viable à long terme est celle qui propose "un Etat, deux peuples", on oublie souvent en effet que la population israélienne (frontières de 67) est constituée de 20% de Palestiniens. Jérusalem sera en majorité palestinienne en 2020. Il n'y a qu'une solution à long terme (si bien sûr on s'oppose au concept d'épuration ethnique), c'est celle qui englobe la totalité de la Palestine historique, avec des garanties de représentation pour chaque communauté, quelle que soit l'évolution démographique. Ceci relève évidemment de l'utopie dans le cadre actuel.

(4) Article Nations Unies. Et selon le journal israelien Haaretz, 1200 obus, liberant un million de bombes a sous-munition (clusters) : Lien vers l'article

(5) ce dernier ayant été largement soutenu par les services secrets israéliens pour contrer le Fatah dans les Territoires Occupés.

(6) du point de vue du droit international, et malgré les déclarations du régime de Damas comme quoi ils doivent retourner sous le giron libanais, ces territoires appartiennent officiellement à la République Arabe Syrienne. Ils sont inscrits comme tel à l'ONU. La logique est la suivante : la Syrie refuse de faire les démarches nécessaires auprès de l'ONU tant que cette portion de territoire est occupée par Israël. Israël ne veut s'en désengager tant que la Syrie ne le cède au Liban par voie officielle et reconnue auprès de l'ONU. Le Hizbullah en fait la cause de son engagement. Cercle vicieux dans lequel aucune des trois parties n'a peut-être intérêt à un appaisement de la situation. Le tout sur le compte du Liban.

jeudi, mai 03, 2007

La victoire divine bis

Le 1er mai, jour de la fete du travail, la commission israelienne WINOGRAD a donc publie ce fameux rapport tant attendu (plus par certains que par d'autres) sur les responsabilites de la defaite de l'armee israelienne au Sud-Liban en juillet 2006. Voir un resume du rapport et surtout un impressionant enonce des responsabilites individuelles, poste par poste sur le site du quotidien israelien Haaretz.

Vous pensez bien que si il y en a bien un qui jubile de ce cote-ci de la frontiere, c'est un certain Said Hassan Nasrallah. Il se montre a la fois bon prince et ironique. Admirativo-sarcastique d'abord, devant le fait qu'une commission appointee par Olmert condamne Olmert. Ironique aussi quand il signale qu'il a fallu une commission israelienne pour reconnaitre la victoire divine du Hizbollah a l'issue de la guerre de l'ete dernier. Petit coup de canif en passant envers ses adversaires politiques au Liban.

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